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Cédric Bouleau
18 novembre 2020

Comme un doute, un de plus

Analphabète du cœur, torpilleur d'amitiés, cancre invétéré en séduction... Misère, oh misère ! Que nenni dit la petite voix, cancrelat nous dit une autre. Il n'est que de voguer, prendre notre colère en patience, tergiverser, oui pourquoi pas tergiverser. Inventer des arrières-mondes et becqueter notre bonne humeur en chantant des bêtises tout public. Qu'avons-nous appris ? Je crois que nous n'apprenons jamais... Il y avait pourtant de la place pour la raison. Mais notre enthousiasme était plus fort, il se débattait, imaginait un week-end qui chante et faisait apparaître quelques idées qui, de façon scolaire, avaient peut-être un intérêt. Travaillons notre grammaire, défoulons-nous sur un traitement de texte – le pauvre, il n'a rien fait – et tapons tant qu'il nous reste du suc. A quelle fin nous nous destinons, il est deux écoles. L'une, triste mais réaliste, nous emmène au creux du néant quand l'autre, joyeuse et fière, nous promet les étoiles et le tralala. Entre les deux, on ne rencontre que circonspection et acrimonie. Nous nous modérons, nous épiloguons un coup, sans doute trouverons-nous quelque chose de positif à dire sur notre désert le long d'une amertume qui s'étale dans le sable gris de nos états d'âme injustifiés. Après tout... rien ? Voilà tout, donc pas rien mais bon... On peut penser qu'il faut mériter ce que nous voulons et nous le pensons en filigrane, à peu près finalement, car nous sommes aises de croire que trop nous est déjà tombé sur la tête. Mais nous insistons, si si. Marginaux, a priori trop sales (peut-être pas dans nos têtes) et losers solaires, nous végétons dans des prémonitions qui ne trouvent jamais acte et nous n'arrivons pas à croire que notre destin est déjà bouclé. Qu'il faut le suivre, mal coiffés, drôlement habillés, avec une tache dans l'aile est de notre poitrine, des chakras en péril que notre scepticisme religieux nous fait prendre pour des lanternes psychosomatiques et une impossibilité à faire le deuil de notre retour parmi ceux qui réussissent. Oui, nous insistons. Car il est des personnes qui nous aiment tels et tant pis pour le reste. Nous baignons dans le Gange, avec une sorte de feu sacré qui nous fait persévérer dans notre immobilisme acclimaté. Et si nous nous étions trompés ? Et s'il y avait un avenir pour notre bêtise romantique ? Nous pourrions alors déployer un nouveau Livre de Vie, perclus d'odes soufies et de rêves à la Ib'n Arabî, de chants grégoriens qui se contentent de la matière, de kabbales fêtardes et de renversements de l'obscurité maladive de mes textes en lumière radioactive. Ce serait notre petit Noël rien qu'à nous, nous accorderions plus de place à mal écrire et nous deviendrions tout miel de certitudes que la Providence peut nous toucher un bon quart d'heure. Nous ne nous sommes pas trompés de siècle, nous nous sommes juste trompés de lieu, notre bohème est une utopie, elle n'est tout simplement pas, nous nous fourvoyons. Mais les autres, comment font-ils ? Pareillement ! Ils se bercent qui de belles illusions, qui d'une routine dans laquelle ils s'épuisent de façon obsessionnelle. Nous avons nous-mêmes de belles obsessions, ce qui nous range pour moitié dans chacun des cas précédents. Écartelés, décérébrés, oubliés de la Roue de la Fortune, il nous reste le plaisir d'être en phase avec un échec relativement heureux. Continuons !

C'est dans une comédie que nous errons, tout prête à rire – jaune, certes – et nous faisons de nos erreurs des sketchs à raconter comme si nous aussi nous avions vraiment une vie. Est-ce que nous demandons trop ou est-ce nous qui ne sommes pas assez ? Le bilan est le même, en sortant de notre Gange, nous sentons la misère, même si parfois nous gagnons à Twilight Struggle. Nous sommes d'humeur à nous poser des tas de questions. En fait, la littérature est un précipice pour les questions aux réponses impossibles et nous y jetons nos névroses pour les épargner aux autres dans la vie réelle. Malheureux celui qui nous lit, il n'y pêchera que le doute et le fiasco sinon les ordures d'un esprit qui se torture pour le sport. Mais nous ne nous jetterons pas dans les bras de la mort, il nous faut construire un monument à la gloire de l'impuissance à être des vôtres pour de bon. Il se tisse là, dans ces lignes, de façon un peu prétentieuse – ce que nous assumons – avec pour seuls garde-fou la bonne intelligence de la grammaire. Un chaos de pensées se doit d'y prêter allégeance malgré tout. Que serions-nous sans un bon Bescherelle ? Nous sommes comme les fous aux échecs, nous allons de travers mais nous en respectons la règle. Nous sommes ballons aussi, nous rebondissons. Pas très haut bien sûr, juste de quoi voir un petit peu plus vers l'horizon. Par prétexte que le Seigneur nous a lâchés, nous en profitons pour saigner. En mots, ici plaqués pour rien sinon un peu nous amuser. Car, oui, la langue française nous amuse. Quelques fois, nous pensons en anglais, en général c'est quand nous avons des chansons à balancer. I fucked my way up to the top, This is my show. Régal que ces voix plaintives qui par leurs sinistres paroles nous redonnent le moral. Nous ne sommes pas seuls, quelques hères s'enlisent dans les mêmes querelles avec eux-mêmes. Et ils y réussissent bien, auréolés de gloire – si si, ça arrive aussi – et enclins à poursuivre dans les ténèbres le temps d'un concert pour profiter d'un confortable bonheur acquis à la force de leurs réserves financières. Le mal qui nous ronge est juste une idée directrice, il n'existe pas vraiment, ce n'est qu'une invention didactique pour parvenir à nous plaindre avec style. Le bonheur fait trop de mauvais livres, notre malheur en fera un pire. Ici se trouve l'InterZone de nos humeurs, un gloubiboulga de phrases qui se suivent sans retour à la ligne, une œuvre bigarrée et sans rabot, un message à destination du vide qui veut nous engloutir dans un téléfilm. Merveille ! Merveille que la vie lorsqu'on en multiplie le sens et qu'on laisse le monde l'assaisonner de ses interprétations variées. Qu'en pensez-vous ? Qu'en pensons-nous ? Si je vous dis que vous ne tirerez rien de ces inepties, peut-être cela vous donnera-t-il envie de plus en lire. Par curiosité, pour piocher des pensées qui sembleront vous ressembler. En attendant, nous sommes quand même un peu meurtris par toutes ces idées, jetées comme une bouteille à la mer, qui interpellent sur la bonne séance de notre appétit romantique et romanesque. Ici, nous existons moins, nous déblatérons et la princesse dans son château pouffe de rire en nous lisant. Ou alors elle s'inquiète, nous croyant fous, en quel cas elle n'aurait bien sûr pas complètement tort puisque la médecine elle-même en a osé le diagnostic.

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Cédric Bouleau
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